L'eau dans le bassin Rhône-Méditerranée

Après un mois de mai anormalement chaud et sec, les températures sont restées supérieures aux valeurs de saison la majeure partie du mois de juin avec une vague de chaleur intense et extrêmement précoce du 15 au 19 sur l'ensemble du pays. De violents orages accompagnés de fortes précipitations ont bénéficié localement aux ressources en eau superficielles.

Les précipitations ont été déficitaires de 25 % à 75 % de l'est des Pyrénées à l'Isère et au Var, hormis localement dans l'Aude, sur le sud du Gard et sur la côte varoise.

Ce mois de juin se classe au 2^ème rang des mois de juin les plus chauds depuis le début du XX^ème siècle avec une température moyenne de 21,2 °C, soit 2,3 °C au-dessus de la normale. Les maximales ont été particulièrement chaudes, atteignant en moyenne 27,1 °C, soit 2,9 °C de plus que la normale.

Les prévisions saisonnières de Météo-France pour le mois de juillet privilégient un scénario à une température moyenne supérieure aux normales avec des épisodes caniculaires sur une bonne partie de l'Occitanie, de PACA et d'Auvergne-Rhône-Alpes. Côté précipitations, les conditions devraient être plus sèches que la normale.

Cumul des précipitations efficaces (Juin 2022)	Comparaison des cumuls de précipitations efficaces (du 01/09/2022 au 01/07/2022)
Rapport à la normale 1981-2010 du cumul des précipitations efficaces de septembre 2021 à juin 2022

Le déficit de précipitation enregistré au mois de mai s'est poursuivi sur la première moitié du mois de juin. La troisième décade de juin a vu le passage de perturbations orageuses qui ont localement apporté des précipitations conséquentes et permis de créer un palier dans la chute des écoulements initiée ce printemps. Une fois les épisodes orageux de fin juin/début juillet passés, la chute importante de l'hydraulicité des cours d'eau a repris. L'apport d'eau issu de la fonte précoce du manteau neigeux s'est tari dès la mi-juin. La majorité des cours d'eau du bassin enregistre une hydraulicité très basse et inférieure a minima de 20 % à l'hydraulicité moyenne. La situation est très fragile.

Le constat de ruptures d'écoulement et les assecs s'accélèrent sur de nombreuses têtes de bassin des cours d'eau, en particulier sur les fleuves côtiers azuréens et du Gard. Deux fois plus d'assecs qu'en 2019 et 2020, mais moins critique qu'en 2017 qui avait été particulièrement précoce. Les cours d'eau du bassin et d'Auvergne enregistrent en majorité des débits de base inférieurs à la décennale sèche.

Le débit de base correspond au débit minimal rencontré sur un cours d'eau, un mois donné, sur une durée de 3 jours consécutifs (VCN3).

La décennale sèche est une grandeur hydrologique permettant de caractériser l'intensité d'un étiage (biennal, quinquennal, décennal, etc.). Plus cette valeur s'écarte de la moyenne, plus l'éventement est intense. 

L'hydraulicité à l'aval de la Saône est particulièrement faible, avec des risques accrus d'extension des phénomènes d'eutrophisation. Le débit du Rhône aval entre Valence et Beaucaire est dans les plus bas connus depuis 100 ans. 

En juin, la vidange se poursuit et l'ensemble des nappes observent des niveaux en baisse. Ce constat est habituel en été. Les pluies orageuses importantes de la troisième décade de juin ont principalement permis d'humidifier les sols et bénéficié à la végétation mais elles ne se sont pas infiltrées en profondeur vers les nappes. La situation est plus préoccupante pour les aquifères côtiers de PACA et le couloir rhodanien (Bas-Dauphiné, Provence-Alpes-Côte d'Azur) dont les niveaux sont en majorité très bas.

Au 1er juillet, la situation de remplissage des retenues reste satisfaisante, malgré le déficit pluviométrique en raison d'une gestion prudente de la part des gestionnaires de retenues (arrêt des turbinages dès fin avril). Les valeurs de remplissage sont en majorité supérieures à 75 % sur la région Occitanie et à 60 % sur la région Bourgogne-Franche-Comté. Les retenues des Alpes du sud ont un niveau préoccupant proche de 50 % correspondant à leur niveau en toute fin de période d'étiage. Le niveau des principales retenues de la région PACA (Serre-Ponçon, Verdon, Sainte-Croix, Castillon) a encore baissé et de façon historiquement basse pour la région (- 10 mètres sous la côte touristique à Serre-Ponçon - le lac de Castillon est en partie plus navigable) et certaines activités touristiques et sportives en lien avec ces retenues ne sont déjà plus possibles (arrêt du canoë-kayak en Ardèche, lâchés de Montpezat et gorges du Verdon, retenues de Sainte-Croix, etc.).

Au 1er juillet, les sols de haute et de moyenne altitude des reliefs des Vosges, du Jura, des Alpes du nord bénéficient d'un bon indice d'humidité, relevé par les précipitations orageuses de fin juin. Les sols sur le delta du Rhône et sur la région PACA sont extrêmement secs, le couloir Rhône-Saône jusqu'à Mâcon reste sec également, malgré les précipitations orageuses de la fin du mois de juin.

Les fortes chaleurs et le vent soutenu ayant caractérisé le mois de juin ont eu un impact baissier sur les écoulement et ce malgré les précipitations orageuses de la troisième décade de juin. Les campagnes ONDE ont été réalisées par l'OFB sur l'ensemble du bassin Rhône-Méditerranée entre le 22 et le 27 juin 2022 et elles ont permis de constater des assecs sur 16% des cours d'eau observés (122 assecs observés sur 744 observations menées fin juin). Les épisodes orageux et précipitations localisées ne sont pas suffisants pour éviter la poursuite de la dégradation de l'hydraulicité des cours d'eau particulièrement préoccupante sur l'Isère et sur la Drôme, ainsi que sur l'ensemble de PACA et dans le Gard. La dégradation des conditions d'habitats de ces espèces amène les fédérations de pêche à pratique des pêches de sauvegarde sur certains cours d'eau (Drôme, Isère, Bouches-du-Rhône, etc.). Cet étiage sévère et précoce arrivé avec un mois d'avance sur les normales de ces dernières années fragilise considérablement les écosystèmes associés. Les indices ONDE les plus bas constatés sont localisés sur les départements du Var (5,5), de l'Isère (6,5) et de la Drôme (<7).

Au 18 juillet, vingt départements ont mis en oeuvre des mesures d'anticipation aux restrictions des usages de l'eau par la révision des arrêtés cadre interdépartementaux (ACi) et départementaux (ACd) :

• 6 ACi sur 7 ont été signés à ce jour ( à l'exception de la Siagne suspendue à la signature de l'arrêté cadre sur le département des Alpes-Maritimes;
• 20 ACd sont signés sur les 27 départements du bassin Rhône-Méditerranée (01, 04, 07, 11, 13, 21, 25, 26, 38, 39, 52, 69, 70, 71, 73, 74, 83, 84, 88, 90). La consultation du public est terminée pour trois départements (05, 06, 48) laissant entrevoir une signature prochaine. Les 4 départements restants ont engagé le travail de révision des précédents arrêtés (30, 34, 42, 66).

Au 18 juillet, face à la situation hydrologique constatée et aux prévisions de fortes chaleurs annoncées par Météo-France pour les dix prochains jours au moins sur toute la moitié sud du territoire français, l'ensemble des 27 préfets de département du bassin a été amené à prendre des mesures de restrictions.

Le mois de juin a vu de nombreux départements renforcer les mesures de restrictions initiées courant mai, ainsi que la grande majorité des comités interdépartementaux.

Eaux superficielles :

• 4 départements ont des sous-bassins en crise :
  • 13 : Réal de Jouques, Huveaune;
  • 83 : Huveaune amont ;
  • 06 : Esteron, Artuby, Brague, Paillons;
  • 07 : Ouvèze
• 23 départements ont des bassins en alerte renforcée (04, 05, 06, 07, 11, 13, 21, 25, 26, 30, 34, 38, 39, 42, 52, 69, 70, 73, 74, 83, 84, 88, 90) ;
• 19 départements ont des sous-bassins en alerte (04, 05, 07, 11, 13, 21, 25, 26, 30, 34, 38, 42, 48, 66, 69, 73, 74, 83, 84) ;
• 16 départements ont des sous-bassins en vigilance (01, 04, 05, 06, 11, 13, 21, 26, 30, 34, 38, 66, 71, 73, 83, 84).

Eaux souterraines :

• 10 départements ont des zones en alerte renforcée :
  • 01 : Dombes sud ;
  • 05 : Eygues;
  • 25 : Allan ;
  • 26 : Galaure-Drôme des Collines, Valence bas Dauphiné, Alluvions de la Drôme, Roubion/Jabron, Merre, Méouge ;
  • 30 : Vidourle, Cèze-amont, Cèze-aval, Gardon-aval;
  • 38 : Molasse, Miocène-Chambran ;
  • 66 : Le Tech ;
  • 73 : Combe de Savoie, Lac de Bourget, Chéran, Guiers/Chartreuse, Flon/Aiguebelette ;
  • 84 : Lez/Lauzon, sud Lubéron, Cavalon-médian ;
  • 90 : Allan.
• 10 départements ont des zones en alerte (01, 04, 07, 11, 30, 34, 38, 66, 73, 84) ;
• 13 départements ont des zones en vigilance (01, 04, 07, 13, 26, 30, 34, 39, 66, 69, 73, 83, 84).

Attention : des différences peuvent apparaître entre le texte et les cartes extraites de Propluvia à date, qui sont actualisées dans un second temps entre les services de l'Etat en département, en région et au niveau du bassin

Site PROPLUVIA, les restrictions d'eau

Restrictions spécifiques aux eaux superficielles au 18/07/2022	Restrictions spécifiques aux eaux souterraines au 18/07/2022
Légende des cartes :