Depuis que la société industrielle et la consommation touristique de loisirs se sont généralisées, l'homme a de plus en plus d'influence sur l'évolution des plans d'eau. Il en a fait un espace de loisirs en même temps qu'un potentiel industriel et énergétique exploitable. Le lac est devenu une ressource importante de l'activité humaine des régions alpines, mais il demeure fragile.
Sommaire
L'aménagement hydroélectrique
Celui-ci s'est particulièrement développé dans les Alpes, pour ce qui est des plans d'eau. L'énergie des grandes retenues présente trois caractéristiques économiques principales : elle est assez disséminée dans le territoire, renouvelable et rapidement mobilisable. Mais comme l'énergie électrique n'est pas stockable en grandes quantités et que la demande est variable, cela a conduit au développement des stations de transfert de l'énergie par pompage.
La sécurité permanente tant des ouvrages que des populations riveraines est une préoccupation permanente d'EDF. La recherche de toutes les conditions de sûreté se base sur la géologie du site (absence de glissements de terrain, de failles), l'hydrologie (définition des ouvrages d'évacuation des crues), la constitution des éléments constructifs (matériaux, fondations).
Principales retenues alpines (source EDF, janvier 1987)
Département | Retenues |
Capacité |
Savoie | Bissorte La Girotte La Gittaz Mont-Cenis Plan d'Amont Plan d'Aval Roselend Saint Guérin Tignes (Chevril) |
39,5 50,2 13,7 326,7 8 4,1 185,6 13,5 228,8 |
Isère | Chambon Grand'Maison Monteynard N-Dame de Commiers St Pierre Cognet Sautet Verney |
50,8 137 275 33,6 27,5 107,7 15,8 |
Hautes-Alpes Alpes de Haute Provence |
Serre Ponçon Castillon Chaudanne |
1270 149 16 |
Var | Gréoux Quinson Saint Cassien Sainte Croix |
80 19,5 60 767 |
L'établissement de barrages entraînant la création de retenues en dérivation sur un cours d'eau conduit au dépôt des particules transportées, du fait de la diminution de la vitesse de l'eau. L'envasement apparaît donc comme une évolution incontournable des retenues et la vidange se revèle souvent nécessaire. Pour les grands barrages, elle est souvent combinée avec la visite décennale obligatoire des ouvrages. Il existe plusieurs procédés :
- en utilisantles courants de densité lors de l'arrivée d'une crue ; dès qu'ils atteignent le barrage, ils sont évacués grâce à de petites vannes.
- Leschasses permettent de baisser le niveau du plan d'eau pour accélérer la vitesse du courant et ainsi la capacité d'érosion de l'eau (Génissiat, les retenues de Maurienne, la basse Isère).
- Ledragage des vases (Montélimar).
- Lecurage à sec des petites retenues (barrage du Flumet, retenue du Verney). Mais pour qu'une vidange réussisse parfaitement et dans les meilleures conditions de sécurité, il faut que la période de réalisation ait été judicieusement choisie en fonction de l'hydrologie du cours d'eau et des contraintes d'exploitation (tourisme, eau potable, hydroélectricité ...).
Mise en place des plants d'espèces herbacées
sur la zone de marnage
Ces aménagements hydroélectriques en barrages et retenues ont quelquefois des conséquences dommageables sur les milieux biologiques et physiques des plans d'eau. Les variations de niveau d'eau ou marnage* entraînent une extrême sensibilité des berges découvertes à l'érosion ; elles deviennent inhospitalières à toutes formes de vie terrestre ou aquatique.
Cependant certains essais de réhabilitation de cet environnement ont été entrepris par exemple au lac de Monteynard grâce à l'alliance de l'Agence de l'Eau Rhône-Méditerranée et Corse, de la DIREN Rhône-Alpes, d'EDF et du SIVOM du lac.
Les objectifs retenus étaient ici la lutte contre l'érosion des berges et l'intégration paysagère et écologique de la retenue.
Des essais d'acclimatation de six espèces herbacées ont été effectués sur la zone de marnage de deux sites. Il a ainsi pu être étudiée la résistance de chaque espèce à différents niveaux sur la berge (une zone haute et une zone basse immergée et dans des conditions extrêmes d'immersion et de sécheresse alternées).
Les techniques classiques de protection des berges des cours d'eau n'ont pas apporté les résultats escomptés; tandis que les essais sur les zones de marnage se sont révélés plus prometteurs. Des résultats techniques et scientifiques concluants ont déjà été obtenus sur ce plan d'eau qui permet de tenir lieu de référence pour d'autres réalisations.
Pour en savoir plus : Etude de l'Agence de l'Eau n° 66
La pêche professionnelle
Il subsiste environ 64 pêcheurs professionnels sur les lacs de Rhône-Alpes dont environ une cinquantaine sur le lac Léman. Cette pêche professionnelle cohabite avec la pêche amateur aux engins (traîne, sonde ...). En général le nombre des pêcheurs professionnels se réduit, leur âge moyen augmente ; les prises diminuent en tonnage et en qualité. Mais cette évolution n'est pas régulière et se fait par soubresauts.
Lacs | Léman | Annecy | le Bourget |
Nb Pêcheurs professionnels |
67 |
4 |
8 |
Nb Pêcheurs amateurs |
675 |
1100 |
1400 |
Nb Espèces de poissons |
23 |
14 |
20 |
Tonnage des prises annuelles en moyenne (1990 - 1997) |
328,2 |
32,4 |
98,2 |
Répartition des espèces capturées | |||
Corégone % |
35,4 |
62,5 |
2,4 |
Perche % |
38,5 |
9,5 |
15,3 |
Truite % |
4 |
2 |
4 |
Omble % |
9 |
15 |
3,6 |
Gardon % |
7 |
inconnu |
29,7 |
Autres dont friture % |
6 |
11 |
45 |
Les espèces les plus recherchées comme l'omble chevalier ou les corégones sont menacées par les effets de l'eutrophisation qui menace la survie des oeufs (envasement, manque d'oxygène). C'est pourquoi l'INRA a développé un programme de recherche appliquée : le pacage lacustre. Il s'agit de mener à une taille de 5 à 6 cm, un stock de larves produites en pisciculture à partir de géniteurs sauvages du lac.
Une réalisation pilote comprend notamment des cages immergées de grossissement pour les alevins ; ceux-ci reçoivent de la nourriture artificielle mais aussi du plancton attiré la nuit à travers les mailles de la cages par un éclairage immergé.
Les résultats sont particulièrement probants sur le Bourget et le Léman (professionnels) mais aussi sur de plus petits lacs comme Laffrey et Aiguebelette gérés par des amateurs. Cette expérience vise le maintient d'un réseau économique stable sur les grands plans d'eau.
Le tourisme
L'usage récréatif des plans d'eau s'est fortement intensifié depuis une vingtaine d'années.
Le lac est un potentiel touristique et donc économique fort pour les régions lacustres. L'aménagement des plans d'eau et l'utilisation de l'eau pour les loisirs sont devenus depuis les années 1970, un des éléments les plus importants du développement du tourisme en espace rural.
Ces aménagements entraînent souvent une privatisation des équipements et la naissance de conflits d'intérêts.
Les activités sont en effet nombreuses et variées : baignade, canotage, planche à voile, navigation à moteur, loisirs terrestres annexes ... d'où un suréquipement et une occupation désordonnée du littoral.
C'est pour cela qu'une gestion et une organisation stricte de l'aménagement des plans d'eau paraissent nécessaires. Ainsi, un équipement en profondeur au bénéfice de l'arrière-pays paraît être préférable à des mesures confinées sur le littoral.
Il existe quelques possibilités de réhabilitation presque complète d'un plan d'eau quand plusieurs usages sont compromis. C'est le cas par exemple des travaux effectués sur le lac de Saint Martial pour lutter contre la prolifération des algues planctoniques et l'eutrophisation aggravée par la fréquentation des baigneurs (qui remuent les sédiments) et plutôt favoriser une activité touristique «propre».
Cette grande vague de réhabilitation s'est déroulée en plusieurs phases complémentaires : opération de vidange complète, chaulage des sédiments, aménagements de la plage, création d'un chenal, plantation de végétaux et suivi du lac. Dix ans après, le lac montre toujours un bon équilibre entre végétaux supérieurs et algues planctoniques, tout en conservant une transparence satisfaisante.
Développement touristique et respect de l'écosystème se trouvent à présent justement combinés.